Projet de motion contre la réforme de l’asile

Reportée ou morcelée, elle n’en est pas moins dangereuse pour les demandeurs d’asile

L’examen du « Projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » a été interrompu
après son passage en Commission des lois du Sénat mais non pas abandonné. Il est reporté de
« quelques semaines » et sera découpé en différents textes pour le faire passer par morceaux à
l’Assemblée nationale et au Sénat – ou pas : en effet, sont mentionnés des textes qui pourraient
aussi bien faire l’objet de décrets, comme s’en alarment certains sénateurs. Cela ne le rend
évidemment pas plus acceptable aux yeux de Casas et notre inquiétude s’accroît devant l’obstination du gouvernement et l’emploi de cette méthode qui risque d’estomper la logique d’ensemble du projet et supprimer des possibilités de débats.

Casas est opposé à la territorialisation de l’OFPRA et de la CNDA
Des « pôles territoriaux » appelés France Asile seraient créés où s’effectueraient pêle-mêle les
activités liées au dépôt de la demande (en GUDA [1]) et celles liées à l’examen du fond du dossier (OFPRA [2]). Dans cette configuration qui suppose un regroupement des personnels, les agents de l’OFPRA risquent de perdre leur indépendance par rapport à la préfecture. Et que deviendrait l’accompagnement pour la constitution du dossier initial ? La CNDA [3] quant à elle créerait des chambres territoriales qui la rapprocheraient des demandeurs mais poseraient des problèmes de coordination entre les personnels impliqués (juges, rapporteurs, secrétaires, interprètes, avocats). La territorialisation risque de multiplier les vidéo-audiences au détriment des interactions en présence.

Casas est opposé à la généralisation du juge unique à la CNDA Sauf exception, tous les recours auprès de la CNDA seraient jugés par un juge unique, même si le juge ou le président de la Cour peut inscrire le cas en formation collégiale, ou le requérant en faire la demande au président ; rien ne dit comment cette demande devrait être motivée ni comment elle serait reçue. La défenseure des droits condamne sévèrement l’abandon de la collégialité, contraire à la complexité des échanges qui seule peut éclairer la situation des requérants. De plus, cette mesure exclut la personnalité qualifiée venue du Haut-commissariat aux Réfugiés (HCR) de toutes les décisions prises à juge unique. Cette disposition est donc aussi un geste politique faisant perdre la référence institutionnelle à la Convention de Genève, le HCR en étant le « gardien ».

Casas est opposé à toute mesure d’OQTF [4] interrompant la démarche de demande d’asile La formulation actuelle du projet de loi laisse entendre et craindre la généralisation des OQTF4 délivrées à chaque rejet de l’OFPRA, avant même le recours à la CNDA ; ces OQTF ont déjà été introduites à l’encontre des personnes en procédure accélérée par la loi de 2018. Cela a des effets traumatisants pour les demandeurs d’asile, les insécurise par la menace de se voir renvoyés dans leur pays et complexifie les conditions d’élaboration de leur recours, tant par le calendrier imposé que par les conditions psychologiques dans lesquelles ils sont mis.

[1guichet unique de demande d’asile

[2Office Français de Protection des Réfugiés et des Apatrides

[3Cour Nationale du Droit d’Asile

[4obligation de quitter le territoire français